Cholet Basket en 50 dates, épisode 5 : Fenerbahçe et la fièvre de l’Euroleague à la Meilleraie
17 novembre 2010. La Meilleraie est prête à s'enflammer alors que les Turcs de Fenerbahçe se déplacent en terres choletaises. C'était il y a bientôt 15 ans déjà, et pourtant ce souvenir est resté bien ancré dans la tête de tous les supporters choletais. Le jour où le petit poucet à su vaincre l'ogre alors encore invaincu de l'Euroleague. Retour sur l'un des plus grands succès de l'histoire de Cholet Basket.
En devenant champion de France en juin, CB avait composté son ticket pour l'Euroleague. Une base solide a décidé de continuer l'aventure avec notamment Samuel Mejia, Antywane Robinson, Randal Falker ou encore Fabien Causeur. Tous sont prêts à relever ce nouveau challenge, mais il y a un premier défi à relever, qui va au-delà de l'aspect sportif. Thierry Chevrier, directeur de l'époque, se souvient : “On se qualifie pour l'Euroleague, mais la salle n'était pas aux normes. Je pense que Gilles Bourdouleix a vraiment joué son rôle. Il y avait déjà eu des aménagements l'année d'avant suite aux deux drafts (ndlr : de Rodrigue Beaubois et Nando De Colo), j'avais demandé qu'on ait des leds par exemple, il fallait investir. On avait besoin de changer de modèle parce que pour vendre des prestations, on avait rien. L'année de l'Euroleague, on a de nouveau réinvesti dans des leds, dans la salle de presse, la salle de musculation, nous avons fait évoluer toutes les infrastructures. C'était extrêmement important pour la continuité de Cholet Basket, c'était important de se remettre en cause sur l'aménagement de la Meilleraie. De toute façon on ne pouvait pas faire autrement, on n'aurait pas pu jouer l'Euroleague sinon”. Même discours chez le Président Chiron : “Il a fallu faire quelques aménagements pour être agréés par l'Euroleague, il ne faut pas l'oublier. Ça nous a permis d'avoir des matchs contre des clubs renommés”. Et en effet, lorsque tombe la phase de groupe, les Choletais découvrent les équipes qui vont venir fouler le parquet de la Meilleraie.
Cibona Zagreb : Champion de Croatie en titre
Lietuvos Rytas : Champion de Lituanie en titre
Montepaschi Siena : Champion d'Italie en titre
Fenerbahçe Ulker : Champion de Turquie en titre
FC Barcelona : Champion d'Europe en titre
“Cholet sera difficile à battre dans cette salle avec cette ambiance.”
C'est du très lourd qui va se déplacer à Cholet. D'ailleurs, CB prend le bouillon d'entrée en s'inclinant de 32pts à Sienne (76-44). Bienvenue en Euroleague ! Arrive alors le premier match dans le volcan de la Meilleraie, et c'est le Champion d'Europe en titre qui va ouvrir les hostilité, le grand FB Barcelone. Le Barça de cette époque ? Juan Carlos Navarro, Ricky Rubio, Victor Sada, Erazem Lorbek, Pete Mickeal pour ne citer qu'eux. Thierry Chevrier se souvient néanmoins “d'une équipe extrêmement agréable, des gens simples. Je leur avais fait visiter nos installations, moi j'étais fier. Ils devaient se dire, bon… Mais moi j'étais fier de ce qu'on avait fait avec la salle de presse ect. Et avec beaucoup de modestie ils étaient venus, avec beaucoup de respect. Barcelone moi ça m'avait marqué.”
C'est un véritable défi qui se dresse devant Cholet Basket et le public est au rendez-vous. Dès l'avant-match, il y a quelque chose de différent à la Meilleraie, comme si tous savaient que c'était une soirée à part. L'arbitre envoie la balle sur l'entre-deux, et les hostilités sont lancées. CB galère en première mi-temps, mais s'accroche. 29-38 à la mi-temps. Pour autant, on ne se débarrasse pas aussi facilement des irréductibles Choletais. Demarcus Nelson, Vule Avdalovic, Antywane Robinson, Mamoutou Diarra. Tous bataillent, sans oublier Fabien Causeur qui doit défendre sur la légende Juanca Navarro. Finalement, c'est Sammy Mejia qui prend le match à son compte, faisant recoller son équipe à 2pts seulement à l'approche du money time. C'est tout le peuple choletais qui y croit et qui pousse. Seulement, on n'enterre pas un champion d'Europe en titre comme ça. Barcelone fait parler l'expérience pour maîtriser la fin de match et s'imposer 77-84. “Cholet n'a pas à rougir”, c'est ce que titre le Courrier de l'Ouest au lendemain du match. C'est le sentiment de fierté qui domine dans les rangs, mais surtout, ce match a donné un nouvel Espoir à cette équipe. Pas encore de victoire certes, mais une adversité qui a laissé entrevoir un vrai potentiel dans cette compétition. “Cholet peut y croire”. Cette fois, c'est le titre de l'Equipe, qui relais d'ailleurs les propos du coach Barcelonais Xavi Pascual : “Cholet sera difficile à battre dans cette salle avec cette ambiance”. Rendez-vous est pris, dès la semaine prochaine à la Meilleraie, contre Vilnius.
Ce rendez-vous, CB ne va pas le louper en ouvrant son compteur face aux Lituaniens (73-69). Mieux, CB va enchaîner à l'extérieur en allant s'imposer à Zagreb (71-84). 2 victoires, 2 défaites avant de recevoir le deuxième gros morceau du groupe : Fenerbahçe Ulker Istanbul.
“Je me souviens d'un match avec une intensité et une ambiance à la Meilleraie qui était complètement dingue.”
Les Turcs se déplacent à Cholet avec l'étiquette de dernière équipe invaincue en Euroleague. “Ils n'avaient perdu aucun match, ni en championnat ni en Euroleague”, se souvient le Malin du Bosphore Erman Kunter. Le Fener pouvait également compter sur ses supporters. “C'était incroyable, il y avait beaucoup de Turcs dans la salle, ils étaient avec leurs maillots, il y a beaucoup de supporters turcs à Cholet” nous dit Thierry Chevrier. Histoire de rajouter encore un peu de difficulté, CB doit composer sans Randal Falker et Fabien Causeur, tous deux blessés. À l'intérieur, Antywane Robinson et Luc-Arthur Vebobe allaient devoir produire encore plus que d'habitude : “Quand je suis arrivé dans cette équipe, j'ai rapidement compris qu'il fallait que je sois au niveau. C'était une équipe championne, ça se sentait dans le vestiaire et sur le terrain”. Se souvient Luca. “Je me souviens d'un match avec une intensité et une ambiance à la Meilleraie qui était complètement dingue”. Et au milieu de cette folie, une action spectaculaire entre les deux ailiers forts. Vule Avdalovic trouve Luca sous le cercle, qui lui-même trouve Antywane d'une superbe passe volleyée avant que son compère ne finisse l'action au dunk. “On fini numéro 1 du top 10 Euroleague cette semaine-là, mais c'était le genre d'équipe qu'on avait, on mettait une grosse intensité, pression tout terrain, et on avait des individualités qui pouvaient sortir des actions spectaculaires par moment, je pense que c'était une année particulièrement agréable à nous voir jouer”, nous dit Luca.
“Sammy avait fait un très gros match, c'était énorme ce match-là” nous dit Erman Kunter. Et en effet, l'artiste Mejia avait éclaboussé la rencontre de son talent. 29 points - 5 rebonds - 3 passes pour 35 d'évaluation. Un vrai match de patron. “Voir ce niveau de basket à la Meilleraie, j'ai trouvé cela merveilleux et c'était excitant. Ce sont des matchs et des moments que les joueurs prennent comme un défi personnel. À ce moment-là, de mon passage à Cholet, je savais que j'étais un bon joueur, mais je voulais jouer contre les meilleurs. Donc, quand nous avons joué en Euroleague et que nous avons joué contre les meilleures équipes tous les jours, j'avais hâte, j'avais faim. Je veux jouer contre ces meilleurs joueurs. Je veux voir ce que c'est, ce que ça fait. Donc, ces matchs étaient toujours excitants pour nous et de les amener ici dans cette salle et de gagner…” Car oui, les Stambouliotes vont mordre la poussière à Cholet, engrangeant leur première défaite de la saison.
“Ils ont des budgets. Ils voulaient gagner des championnats. Nous, nous voulions juste gâcher leur journée.”
Antywane lui, se souvient en rigolant : “Ce sont mes meilleurs souvenirs. Quand on a battu Fenerbahçe à Cholet, Erman Kunter a fumé presque tout un paquet de cigarettes à la mi-temps parce qu'il voulait tellement gagner !” Un match qui revêtait en effet une signification particulière pour le tacticien turc. Et son assistant sur le banc, c'était Jim Bilba. “Erman… C'était contre des Turcs, on avait mis une stratégie en place pour les faire déjouer. On a eu des gros matchs d'Euroleague et celui-là, c'était le match à prendre pour encore espérer pouvoir se qualifier, donc ça avait encore plus de saveur. On a vu que les joueurs pouvaient répondre présents, et montrer au monde qu'ils pouvaient jouer en Euroleague. En 3 ans, on est passé de finale d'Eurochallenge, Champions de France puis Euroleague, tout en gardant une ossature compétitive. Les gens ne se rendent pas forcément compte de ce qu'on a pu réaliser là”. Et Sammy de compléter : “Nous étions la plus petite équipe, vous savez, donc Fenerbahçe, Barcelone, ces équipes-là, ils ont une grosse pression. Ils ont des attentes. Ils ont des budgets. Ils voulaient gagner des championnats. Nous, nous voulions juste gâcher leur journée”. Sammy nous dit ça avec un large sourire, n'empêche qu'à ce moment-là, le bilan de Cholet sur cette phase aller est positif ! 3-2, tout le monde crois à la qualification au Top 16.
Malheureusement la phase retour sera plus compliquée. Les Choletais s'inclinent à Vilnius, y laissant même le goal average. Pire encore, Vilnius s'offre également un exploit en faisant tomber Barcelone chez eux. En dernière journée, CB est condamné à l'exploit chez… le Fenerbahçe. Luca Vebobe s'en souvient encore : “Je me rappelle du match retour aussi, ils avaient vraiment noté la date sur leur calendrier. On prend quelque choses comme 30pts (Score final 93-61), ils nous attendaient avec le couteau entre les dents. Nous on savait que la qualification passait par ce match, mais on a vite compris que ça allait être compliqué”.
Les mots de la fin, nous les laisserons à la légende Sammy Mejia : “C'était juste un moment de fierté pour nous. Nous étions tellement fiers. Nous avons adoré que l'Euroleague soit à Cholet. Juste, l'Euroleague et Cholet, cette combinaison était merveilleuse pour nous”.
Rendez-vous la semaine prochaine, pour un nouvel épisode de “Cholet Basket en 50 dates” !
Avec les témoignages de : Luc-Arthur Vebobe, Antywane Robinson, Samuel Mejia, Erman Kunter, Patrick Chiron, Thierry Chevrier et Jim Bilba
Sources : Site officiel de Cholet Basket, archives Le Courrier de l'Ouest et L'Équipe.
Crédit Photo : Etienne Lizambard
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