Cholet Basket en 50 dates, épisode 6 : Jonathan Rousselle, une sortie avec classe !
Jonathan Rousselle, c'est une histoire dans l'histoire du club. Qui aurait pu imaginer une telle aventure entre le Nordiste et les supporters choletais lorsqu'il a débarqué à la Meilleraie comme deuxième meneur, à l'été 2014 ? Qui aurait pu imaginer qu'il partirait en légende ce mardi 15 mai 2018, après avoir terrassé le rival manceau en dernière journée du championnat ? Retour sur le dernier shoot légendaire de Jonathan Rousselle sous le maillot choletais.
Mardi 15 mai 2018. Ce soir, c'est le dernier match de la saison pour CB, quoi qu'il arrive. Cette saison 2017/18 n'a pas été de tout repos. “C'était une année particulière, avec beaucoup de haut et de bas” se souvient Ilian Evtimov. Jonathan Rousselle, le principal intéressé, détaille un peu plus : “C'était une saison compliquée, avec beaucoup d'aléas. Il y avait vraiment un bon groupe de joueurs. C'est une année où on fait la Leaders Cup sur la phase aller, mais derrière sur la phase retour, on fait une mauvaise série, et ça nous amène à ne pas jouer les Playoffs. Malgré tout, on se maintient”. Ce maintien, il est obtenu quelques jours plus tôt à Hyères-Toulon. CB se fait peur, mais CB assure en s'imposant de six longueurs (80-86). Objectif rempli pour les hommes de Philippe Hervé.
"Je l'avais annoncé, tout le monde savait que c'était mon dernier match."
Ce maintien, celui que l'on appelle Jo n'y est pas du tout étranger. Au-delà de signer sa plus belle ligne de stats en carrière au plus haut niveau (9,4pts - 3,6rbds - 3,9pds - 12,1 d'évaluation), le capitaine choletais a su montrer l'exemple en étant clutch tout au long de l'exercice. Premier fait d'armes contre Gravelines à domicile, en décembre. 74-74 lorsque Jonathan crucifie son club formateur d'un énorme step back à 3pts à 1,4s du buzzer final ! Deuxième fait d'armes, à Antibes en avril. Cholet Basket vient d'enchaîner sept revers consécutifs, le danger de la relégation se fait de plus en plus sentir. C'est un match capital qui se joue face aux Sharks. À quelques secondes du terme, CB est mené d'un point et s'en remet à son capitaine. Après un bon écran de Jerry Boutsiele, Jo décoche à 3pts et la balle vient transpercer le filet. Il ne reste que 5,7s, Antibes ne parvient pas à marquer, et CB s'empare d'un succès précieux dans le sud. Jonathan Rousselle est plus qu'un leader dans cette équipe, il est devenu l'homme des ballons chauds. “C'était important parce qu'on savait que les victoires étaient chères, et surtout, on avait une construction d'équipe où on avait une mène française. Donc à un moment donné, des ballons chauds, j'allais être amené à devoir en négocier. C'est important de répondre présent, de rendre la confiance aux gens qui te donnent l'opportunité. Je pense au club, mais je pense aussi à Philippe Hervé, parce qu'avoir le courage d'avoir une mène française, tous les clubs ne le font pas, et lui, il l'a fait. Donc derrière, tu veux rendre, et rendre c'est répondre présent dans les moments importants. C'est ce que j'ai essayé de faire avec David Michineau cette année-là. Quand tu sens la confiance de tes coéquipiers et de ton coach, ces tirs-là, tu ne te poses pas la question de si tu dois les prendre ou pas en fait, ça se fait naturellement, le jeu amène ça”.
À l'aube du dernier match de la saison, CB est donc maintenu et ne peut plus viser les Playoffs. Son adversaire du soir a lui déjà verrouillé sa 3ème place en championnat. Et cet adversaire n'est autre que le rival manceau. Pour Jonathan Rousselle, ce match sera son dernier avec CB. “J'avais décidé de partir à la fin de la saison, parce que mine de rien, ça faisait une année de plus où malheureusement, on ne jouait pas les premiers rôles, et ça devenait éreintant de jouer des matchs pour le maintien. J'avais plus d'ambitions, alors j'avais décidé de partir à Limoges, je l'avais annoncé, tout le monde savait que c'était mon dernier match. Avec le coach aussi, Philippe Hervé, donc c'était un peu une fin de cycle, une passation avec les jeunes qui arrivaient, Abdoulaye N'Doye, Killian Hayes”. Un match qui n'a donc aucun enjeu au classement, mais qui reste un match de Pro A, et surtout un derby. “Ce genre de match, il faut le jouer déjà en respectant les gens qui sont venus nous voir, qui ont payé leur place. Il faut respecter le club, le maillot, et se respecter soit aussi. Pour moi des matchs qui ne comptent pas, il n'y en a pas. Il y a des matchs qui ont plus d'importance que d'autres, mais au final, chaque match doit être abordé de la même manière, tu dois le préparer de la même manière, donc c'était un match où j'avais envie de bien finir, j'avais envie de donner une bonne image. On dit souvent que le match le plus important, c'est le dernier que tu as joué, donc c'est important de jouer chaque match avec la même envie. De toute façon même quand on est à l'entraînement, on a envie de gagner le moindre exercice, donc il n'y a pas de raison qu'en match, on ait moins envie de le gagner”.
"On se parle sur le temps mort et Philippe me dit : Le dernier tir c'est pour toi."
La rencontre démarre en respectant la hiérarchie de la saison. Le Mans, futur Champion de France en 2018, prend les commandes du match et mène de 2pts à la mi-temps. La seconde période ? De la folie pure, notamment porté par le premier coup d'éclat du jeune Killian Hayes qui montre toute l'étendue de son talent. Comme depuis le début de la saison, Captain Rousselle guide les siens. Il signera d'ailleurs son meilleur match statistique avec CB ce soir là (23pts - 4 rbds - 5pds - 27 d'évaluation). Il reste alors 11,5s à jouer. Justin Cobbs est aux lancers francs et marque le premier donnant 2pts d'avance à son équipe (78-80). La suite, c'est Jo qui nous la raconte. “ça a été super vite. Ils tirent des lancers et on a eu un temps mort juste avant. On se parle sur le temps mort et Philippe me dit : Le dernier tir c'est pour toi. Il me le glisse, donc moi je sais que quoi qu'il arrive s'il y a une dernière balle je veux la jouer. Parce que cette année-là, ça m'avait souvent souri, c'était une année où il y avait eu pas mal de tirs décisifs et j'avais réussi à en mettre quelques-uns. Donc on s'était dit que quoi qu'il arrive, je prenais le dernier tir. Derrière, il rate son deuxième lancer, je remonte la balle, Jerry vient me faire un écran, et je sais que je ne vais pas être ouvert longtemps. Je sais que Youssoupha Fall ne va pas sortir fort, donc je vais avoir une fenêtre de tir et je la prends direct. Je ne me rends pas compte à quel point je suis loin. Ce sont des tirs que j'affectionne, et c'est vrai que ne pas avoir la pression de la saison sur ce tir-là, tu le prends plus libéré ça, c'est une certitude. Il est rentré, et ça a fait une belle image, et surtout un beau souvenir. Un beau clap de fin sur l'aventure CB”.
Et ce shoot-là, il n'est pas le seul à en parler. Ilian Evtimov raconte : “Je me rappelle très bien de ce shoot. La trajectoire de la balle était tellement haute, ce shoot avait l'impression de prendre 5 secondes avant de tomber. C'est le swish le plus clean que j'ai vue de ma carrière. On appelle ceci “BASELINE” avec Jo. La balle rentre, filoche, et avec une telle arrogance, qu'elle touche la ligne de fond sur le premier rebond. Qualité de vrai shooter, car c'est très compliqué à faire. La trajectoire est très importante. Jo est le spécialiste des baselines. Aucune surprise pour un shoot de plus de sa part au moment important du match”. Abdoulaye N'Doye s'en souvient également : “C'était après un rebond, il joue le un contre un, step back, et là la salle s'est enflammée. Avec David (Michineau) on était ensemble sur le banc car on était blessés, on a sauté les panneaux leds, on était très contents”.
"Sept ans après, on en parle encore."
Et en parlant de panneau LEDs, Jonathan a bien célébré son shoot, en sautant sur ces fameuses LEDs. “On s'était fait ça en délire dans la semaine à l'entraînement, donc je m'étais dit que si j'avais l'occasion, je le ferais pour rigoler. Je croyais que le match était terminé, c'est pour ça que je me suis permis de le faire. Quand je vois le tir rentrer, je vois le carré rouge s'allumer, donc moi je me dis que c'est bon, que c'est terminé. Et finalement, ils nous rappellent sur le banc, en fait il restait du temps. Là, je me suis dit : Mon dieu, il ne faut surtout pas qu'ils marquent, parce que s'ils marquent alors que j'ai fait ça, je vais avoir l'air d'un clown. Au final, ça va ils ont raté leur dernier tir, donc tout est bien qui finit bien”.
Après Gravelines, après Antibes, jamais 2 sans 3. Jonathan Rousselle termine ses 4 années à Cholet de la plus belle des manières. Sylvain Delorme, alors coach assistant, préfère d'ailleurs noter sa progression : “Je ne me rappelle plus de ce dernier match. Je me souviens plus de son travail en dehors et notamment ses séances de tirs. C'était assez impressionnant de voir l'évolution de sa réussite et sa capacité à tirer de plus en plus loin”. Thierry Chevrier lui, mets en avant les qualités humaines exemplaires de Jo. “C'était une période un peu difficile sportivement, mais Jo humainement… Il n'y avait vraiment rien à dire. C'est quelqu'un qui je pense a grandi avec Cholet, dans un contexte qui n'était pas évident. Je suis très fier du parcours qu'il a réalisé parce que je suis un peu pour quelque chose dans sa venue, et dans son renouvellement. Il avait une telle image auprès des supporters, des partenaires. Avec le président Didier Barré, nous voulions absolument le conserver. C'est un très bon souvenir Jonathan”.
Quand on demande au héros du jour si c'était important de bien finir devant les Choletais, il répond : “Clairement parce que regarde, là on en parle encore alors que ça fait sept ans. Sept ans après, on en parle encore, alors il avait quand même de l'enjeu ce match-là. Au final, on en parle, et c'est important l'image que tu laisses. Quand tu te sens bien dans un endroit, tu as envie de soigner ta sortie, tu as envie de rendre aux gens. La dernière impression est souvent la plus importante, donc j'avais à cœur de bien finir, de passer un bon moment et de profiter surtout. J'ai réussi à faire ça parce que quand tu joues un peu libéré, avec les bonnes intentions, il se passe souvent des bonnes choses, et sur ce match-là c'était un joli clin d'œil. Ce n'était pas le tir le plus important de l'histoire, mais malgré tout, c'était un bon souvenir. On a pu finir la saison à domicile, avec notre public, en étant contents. Ça n'avait pas toujours été le cas pendant mes années à Cholet, donc c'était vraiment sympa comme clin d'œil".
Et aujourd'hui, son affection pour Cholet Basket est toujours bien présente. “Dès que ça parle de Cholet, c'est émouvant pour moi, car c'est un club pour lequel j'ai gardé beaucoup d'affection et pour les gens qui y sont encore. Ça a été une étape tellement importante dans ma carrière et dans ma vie, donc il y a une vraie affection. Je suis très content de ce qu'il se passe en ce moment, des bonnes saisons qui s'enchaînent. Il n'y a personne d'autre de plus content que moi de voir ces saisons-là positives, parce que le club a mangé son pain noir et là c'est amplement mérité. Être tout en haut, c'est la place que CB mérite, que ce public mérite. Pourvu que ça dure. Je suis juste reconnaissant parce qu'ils m'ont adopté, ils m'ont fait confiance et ils m'ont donné beaucoup de choses. Dans une carrière de joueur, il y a des moments qui sont charnières, et là, ça l'a été. Donc je reviendrais, c'est sur, au moins en tant que spectateur, revoir tout le monde.
Sept ans après, on en parle toujours oui. Car si ces saisons étaient sportivement compliquées, Jonathan Rousselle a été l'un de ceux qui a toujours porté fièrement le maillot Choletais, contre vents et marées, il a su entrer dans le cœur des Choletais. Ce shoot, c'est comme un symbole. L'histoire de Jonathan Rousselle à Cholet Basket devait bien se terminer, et ce vœu a été exaucé.
Avec les témoignages de : Jonathan Rousselle, Sylvain Delorme, Abdoulaye N'Doye, Ilian Evtimov et Thierry Chevrier.
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