Cholet Basket en 50 dates, épisode 4 : 2005, la jeunesse au pouvoir, jusqu’à Bercy !
15 mai 2005, Cholet Basket vs BCM Gravelines-Dunkerque, au Palais Omnisports de Paris-Bercy. En jeu, une Coupe de France et dans les gradins un bon millier de supporters en rouge pour soutenir leur équipe. On pourrait simplement parler de ce match, de la déception de ne pas soulever une nouvelle coupe après celles de 1998 et 1999, mais cette finale de Coupe de France en 2005, elle représente autre chose. Retour deux ans en arrière, sur deux saisons qui ont marquées le club.
"On était au bord du gouffre."
Nous sommes à l'été 2003. Le club doit faire face à un lourd déficit financier et met en place un plan de redressement (1 million d'euros). Le club se retrouve alors confronté pour la première fois de son histoire à une masse salariale encadrée par la LNB. Thierry Chevrier se souvient : “Il y a une date importante, c'est le 1er juillet 2003. Patrick Chiron prend la direction du club, Erman Kunter devient le coach de CB. Le club était au bord du dépôt de bilan. La municipalité nous a soutenue à l'image de Gilles Bourdouleix, il a cautionné le projet. Mais cette date du 1er juillet 2003, elle a été déterminante pour Erman, pour le club et pour moi. On était au bord du gouffre. Cette saison 2003/04 est extrêmement importante parce qu'elle a rythmé les belles années de CB ensuite“.
Cholet Basket fait confiance à ses jeunes joueurs, ses joueurs du terroir comme les appelle l'ancien directeur, et parmi eux, Cédric Ferchaud : “Thierry Chevrier et Patrick Chiron arrivent à ce moment-là, et ils ont su faire les efforts nécessaires pour aller chercher du sponsoring, pour pouvoir relever le club. Ensuite, ils ont compté sur nous, d'une part car c'était l'opportunité d'avoir des joueurs de qualité à moindre coût. Nous, on n'était pas très regardant sur les salaires, notre rêve, c'était de jouer à Cholet, et de se faire un nom pour pouvoir jouer plus haut ensuite, donc tout le monde était gagnant. C'était une équipe exceptionnelle, moi ça fait partie des meilleurs souvenirs de ma carrière, où on jouait justement avec les joueurs avec qui on jouait en jeune, quand il n'y avait pas les enjeux financiers ou quoi que ce soit, on jouait vraiment pour l'amour du maillot.”
Cyril Akpomedah lui, note les différentes générations qui composaient cette équipe : “Personne ne nous attendait là. C'était la période où on commençait à avoir beaucoup d'Américains et nous, on était une équipe de joueurs formés au club. Ce qui était intéressant, c'est que c'était sur plein de générations, car il y avait Jim Bilba, mais aussi des plus jeunes comme Mike Gelabale.” Et en effet, Mickaël Gelabale se souvient lui aussi de cette première saison dans le grand bain de la Pro A : “Pour moi, j'avais 20 ans, donc c'était énorme de commencer ma carrière professionnelle avec des joueurs formés au club, j'étais à l'aise, je les connaissais bien. Il y avait une osmose dans l'équipe et on savait que l'avenir du club reposait sur nous, donc on voulait tout faire pour gagner nos matchs et passer une bonne saison”. Au milieu de tous ces jeunes, un autre joueur formé au club, mais à l'expérience bien plus grande, un certain Jim Bilba : “On m'avait dit Jim, tu vas avoir un rôle de grand frère avec tous ces jeunes. On a montré à tout le monde qu'on était capable de faire des choses et avec les jeunes, on s'est vraiment appuyé sur tout le centre de formation, on a bousculé beaucoup de gens par rapport à la hiérarchie. Erman avait fait un très gros boulot avec tous les jeunes, même si moi ça me coûtait, car je commençais à avoir quelques kilomètres au compteur, mais il me demandait de m'entraîner comme les autres”. Jim Bilba nous dit ça avec le large sourire que nous lui connaissons, avant de reprendre son sérieux : “Mais ça portait ses fruits, car les jeunes avaient envie d'apprendre, ils étaient à l'écoute, et on a fait une superbe saison”. Et en effet sur cette saison 2003/04, CB termine à une solide 4ème place du championnat. Pas mal, pour un club au bord du gouffre quelques mois plus tôt !
"On avait que 2 américains là où toutes les équipes en avaient 4 ou 5 et nous ils étaient fondus dans l'effectif et ils étaient intégrés parfaitement."
Alors la saison suivante, bis repetita. Confiance aux jeunes du terroir. Erman Kunter s'en est allé du côté de Villeurbanne, et c'est son assistant Ruddy Nelhomme qui prend les commandes de l'équipe. “Pour moi, c'était une année magnifique parce que déjà, c'était ma première année en tant que coach principal dans un club professionnel, en plus avec une grande partie de joueurs français”. David Gautier, lui aussi formé à Cholet Basket, rejoint l'équipe en 2004. “On était un peu la french team, et surtout la team formée à Cholet Basket. Je pense qu'il n'y avait rien de tel pour mettre à l'honneur toute la formation et la qualité du travail mis en place par Jacques Catel et Jean-François Martin, poursuivi ensuite par Sylvain Delorme, Régis Boissié et tous les autres. Je trouve que c'était un symbole exceptionnel. On avait que 2 américains là où toutes les équipes en avaient 4 ou 5 et nous ils étaient fondus dans l'effectif et ils étaient intégrés parfaitement.”
Et cette french team, elle va porter les couleurs de Cholet Basket jusqu'à Bercy, ce fameux 15 mai 2005. “On avait fait un parcours en Coupe de France vraiment magnifique avec des victoires sur le plateau qui avait eu lieu à Limoges, où on avait pu jouer Nancy et Dijon. On avait fait des matchs vraiment extraordinaires. Cette première finale pour moi, avec tout le public choletais qui était venu à Bercy, c'était magnifique.” Nous dit Ruddy Nelhomme. En effet, en quart de finale CB s'impose sur le plus petit des écarts face à Nancy (79-78) et contre Dijon, c'est une courte victoire de 5 pts (86-81) qui propulse les jeunes Choletais en finale. Cédric Ferchaud a lui aussi son analyse de ce parcours de Coupe de France : “ça s'est fini par une grosse déception, car on connaissait les enjeux. On ne parle jamais des perdants des finales, on parle toujours des gagnants, donc ça reste quelque chose de très dur pour moi à avaler encore aujourd'hui, parce que je sais que ça aurait changé beaucoup de choses de rajouter une ligne de palmarès, au club, à nous. Et puis des jeunes joueurs qui sortent du centre, dans la même équipe en pros qui gagnent un titre, ça aurait été juste magnifique. Mais ça n'enlève en rien la belle saison, il fallait la faire la finale, car les matchs d'avant on les gagne de peu, on a bataillé pour arriver jusqu'à la finale. Donc c'était une belle fête pour tous les supporters qui s'identifiaient vraiment à ce groupe de joueurs français formés au club.”
"Jimmal Ball était passé à travers la rencontre et quand on était rentré, il avait retrouvé sa voiture avec les pneus crevés."
Une belle fête, une belle récompense pour l'audace de confier l'avenir du club à des jeunes talents du centre, mais frustrant pour les compétiteurs qui composaient l'équipe. “Ça reste quand même une grande déception, car on aurait pu marquer l'histoire en gagnant cette coupe avec cette équipe aussi française, dans un championnat qui devenait de plus en plus international, donc je sais que moi celle-ci, elle m'est toujours restée en travers de la gorge. On pouvait faire quelque chose d'exceptionnel, sous l'impulsion de Thierry Chevrier, certes du a des problèmes financiers, mais aussi avec un amour du club. Faire cette équipe, avec autant de joueurs formés au club, c'est unique.” Ces mots sont ceux de David Gautier, mais ils résonnent avec ceux justement de Thierry Chevrier : “Ce match me reste toujours en travers de la gorge, j'aurais été tellement content, c'est un trophée que je n'ai pas gagné moi, j'aurais aimé le gagner, et au-delà de ça, le gagner avec cette équipe-là ça aurait été incroyable.” C'était d'ailleurs le même son de cloche, il y a 20 ans dans la presse. Olivier Bardet déclarait à cette époque : “La déception est immense. C'est une terrible fin. Je pense aux 1200 supporters qui sont venus pour nous voir perdre.” Jimmal Ball était lui très lucide sur le déroulé du match : “Gravelines a joué plus dur, a été meilleur que nous, et mérite de gagner”. D'ailleurs, l'ancien directeur de Cholet Basket se souvient des mésaventures de son meneur à l'issue de ce match. “Jimmal Ball était passé à travers la rencontre et quand on était rentré, il avait retrouvé sa voiture avec les pneus crevés. Cette finale, il y avait un peu d'amertume parce que Jimmal nous avait porté, il avait fait une excellente saison, mais à la fin, il avait souffert”.
Pour le capitaine Bilba en revanche, c'est un autre sentiment qui domine quand on lui reparle de cette aventure : “En Coupe de France en 2005, on a été très loin, mais malheureusement, l'expérience a joué face à Gravelines. Mais avec tous les gars de cette époque, on en garde un énorme souvenir. Et je pense que pour le basket français ça a montré aussi qu'on était capable de faire quelque chose, et que Cholet Basket a vraiment un énorme réservoir de jeunes. Pour moi, c'était gratifiant et énorme ce qu'on a réalisé, c'est quasiment comme si on avait gagné la Coupe de France. Pour moi, personnellement. C'était une grosse fierté d'avoir pu être capitaine de ce groupe”. Cyril Akpomedah parlait d'une énorme déception dans la presse au soir de cette défaite. Aujourd'hui, le temps aide certainement à voir les choses autrement : “Avec le recul, tu te dis, on a fait un super parcours, avec une équipe composée de beaucoup de joueurs français et issus du centre de formation. Ça a aussi montré à l'époque que les joueurs du centre, ils peuvent jouer et que tu peux faire des résultats avec. Parce que ce n'est pas tout d'être sur le terrain, mais il faut faire des résultats aussi, et on a montré qu'on pouvait aller loin, que ce soit dans la saison, dans les coupes. Pour moi, c'était hyper positif et jusqu'à maintenant, on en parle entre nous, parce que tous ceux qui ont fait une carrière après, on ne l'a plus jamais revécu d'avoir une équipe comme ça”.
Le point d'orgue d'une saison qui aura également vu un huitième de finale contre un certain PAOK, et une qualification en Playoffs. “Le regret, c'est qu'on n'ait pas pu aller au bout, mais on avait fait une saison pleine parce qu'en championnat aussi on avait été en Playoffs, tout ça avec que des joueurs français formés à Cholet Basket et un américain, Jimmal Ball [ndlr : 2 en réalité, Ryan Robertson ayant rejoint le club en janvier 2005], qui avait été remarquable. On avait fait un bon parcours aussi en championnat d'Europe parque qu'on avait été en 8ème de finale de l'ULEB. Donc vraiment de grands souvenirs par rapport à la formation française, par rapport à tout ce qu'on avait fait avec les joueurs français tels David Gautier, Cédric Ferchaud, Cyril Akpomedah, Claude Marquis, Jim Bilba, on avait vraiment créé un groupe soudé, avec une vraie identité, et avec Jimmal Ball qui avait été vraiment très très bien dans ce groupe. De vrais souvenirs, de vrais moments de partage avec le public choletais, et pour moi une année magnifique parce que c'était ma première année en tant que coach et avec des résultats. Toujours un regret d'avoir perdu cette finale, mais quand même des choses très positives sur cette année” résume Ruddy Nelhomme.
"Notre envie et l'amour du maillot, ils n'ont pas changé, même avec les enjeux financiers"
Patrick Chiron, président de CB à cette époque, ajoute sa vision en faisant le lien avec la situation d'aujourd'hui : “Je crois que ça a toujours été l'ADN du club de donner leur chance aux jeunes. Malheureusement, on ne peut pas garder tout le monde, on l'a encore vu cette année, il y en a qui partent”. Tout comme Jean-François Martin : “Ils n'ont pas eu d'autre choix que de faire appel aux jeunes du centre, mais ça fait très plaisir, ça veut dire quelque part que notre travail au centre a été à la hauteur si on arrive à faire jouer des joueurs à ce niveau-là, c'est qu'on a atteint l'objectif. C'est plus difficile maintenant, les environnements sont plus compliqués. À cette époque-là, les joueurs revenaient. C'est un peu dommage. Ça avait été une super année sportive en plus. Surtout que derrière il y avait aussi Saïd Ben Driss, Jean-Michel Mipoka, Charles Kahudi".
En fin de compte, une bande de potes, issue du centre de formation, qui a eu l'opportunité de faire en pros ce qu'elle faisait chez les jeunes et avec brio ! “C'est marrant parce que notre état d'esprit, notre envie et l'amour du maillot, ils n'ont pas changé, même avec les enjeux financiers, les salaires. On a jamais été à se jalouser sur les salaires, nous, on était vraiment en mode jeunes espoirs qui veulent gagner des titres, et c'est ça qui était fabuleux”, conclu Cédric Ferchaud alors que David Gautier lui souligne : “C'était une mise en avant de la formation choletaise qui n'a plus à faire ses preuves, et de voir tous ces jeunes joueurs sur le terrain en même temps, c'était magnifique, mais on aurait pu mettre les choses encore plus hautes en ramenant ce trophée”.
Pas de nouvelle Coupe de France en 2005 donc, mais une aventure toute particulière qui aura profondément marqué Cholet Basket et son histoire avec la formation.
Avec les témoignages de : Mickaël Gelabale, Cyril Akpomedah, Cédric Ferchaud, David Gautier, Ruddy Nelhomme, Patrick Chiron, Jean-François Martin, Thierry Chevrier et Jim Bilba.
Sources : Site officiel de Cholet Basket et archives Le Courrier de l'Ouest.
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